Timbre et tessiture
- L'équipe de Hent Telenn Breizh
- 25 sept. 2017
- 3 min de lecture

Ici, je souhaiterais aborder un sujet assez pointu qui était un véritable problème pour moi quand je débutais dans le monde du son : la différence entre le timbre et la tessiture.
Tout le monde sait ce qu’est la tessiture : c’est en quelques sortes la valeur absolue de l’étendue sur laquelle se joue une mélodie, sur l’échelle hertzienne. Par exemple, une guitare basse a une tessiture assez grave, puisqu’elle produit des sons qui se situent entre 60 et 300 Hz, tandis qu’un violon a une tessiture beaucoup plus aigue, entre 300 et 4000 Hz.
C’est le cas de dire que la tessiture correspond à la hauteur dans la gamme.
Pourtant, le son d’un instrument ne se mesure pas uniquement à la fréquence en hertz qu’il produit pour chaque note. Sinon, en effet, il n’y aurait aucun moyen de distinguer, disons, un violon d’une trompette, à tessiture égale.
Cette différence de son s’appelle le timbre.
Comment naît le timbre ?
Revenons à notre tessiture, et prenons pour exemple le son du téléphone quand il n’y a rien au bout du fil : c’est un « tuuuuuuuuuuuuut » caractéristique. Si l’on mesure sa hauteur, on voit qu’il est à la fréquence de 440 Hz, soit le bourdon de La sur lequel sont accordés la plupart des instruments.

Mais ici, le son est « lisse » : il n’y a aucun harmonique. Sa forme d’onde serait représentée par un sinusoïde. En somme, il n’émet que dans la fréquence de sa fondamentale.
Voici une capture d’écran d’un équaliseur sur ce genre de sons : comme vous pouvez le voir, la seule fréquence présente sur le spectre est celle de 440 Hz.

Au contraire, prenons la note La d’un piano (la même note). Voici ce que donnerait une capture d’écran de ce type de son :

Ici, au contraire, vous pouvez voir que de très nombreux harmoniques sont produits. En plus du pic sur 440 Hz, on en voit un autre à 220 Hz (l’octave inférieure, en fait), un autre encore à environ 600 Hz (660 pour être précis, car cela correspond à l’harmonique de quinte), encore une autre à 880 Hz, qui représente l’octave supérieure, puis l’octave de la quinte, et ainsi de suite, jusqu’à 5000 Hz.
Si je donne tous ces détails, c’est pour illustrer le fait que ce qui détermine le timbre, c’est en réalité la présence ou l’absence, ainsi que la qualité des harmoniques produits. Ces harmoniques échappent la plupart du temps à l’oreille, mais ce sont toujours eux qui détermine la couleur d’un son.
C’est pour cela qu’on peut entendre parler d’instruments ou de voix qui, bien que relativement grave, ont beaucoup d’harmoniques aigues, comme le hautbois, par exemple. Ou encore, les voix métalliques de certains chanteurs ou des animateurs radio : malgré leur tessiture grave, elles produisent beaucoup d’harmoniques aigus qui leur permettent de porter beaucoup plus loin que des voix de tessitures plus aigues mais produisant moins d’harmoniques aigues, comme beaucoup de voix féminines, ou masculines peu entraînées.
Les gens d’autrefois, habitués à parler en plein air en étant parfois séparés de leurs interlocuteurs de plusieurs centaines de mètres, avaient développé des timbres très particuliers, produisant beaucoup d’harmoniques aigus, tout en gardant une tessiture assez aigue (plus économe en air que les tessitures graves), ce qui permettait à leurs voix de porter à plus d’un kilomètre dans des circonstances adéquates !
Autre chose : par l’égalisation, il est possible, en trouvant les points clés à modifier (ce qui est difficile avec l’équaliseur de Reaper qui manque un peu de précision), de modifier complètement le timbre d’un instrument. J’ai déjà vu un ingénieur du son transformer un son de piano en son de guitare, rien qu’en appliquant une puissante égalisation sur certains harmoniques aigus.
Ces harmoniques peuvent parfois poser quelques problèmes techniques dans certains cas, en mixage, notamment. Le premier CD que j’ai enregistré était entièrement consacré à la harpe à corde de métal (comme tous ceux produits par notre maison d’édition), instrument qui produit une quantité phénoménale d’harmoniques. C’est extrêmement agréable à entendre, mais aussi très difficile à traiter ! Ainsi, les cordes basses produisent un son fondamental d’environ 80 à 90 Hz, mais qui produisent des harmoniques incroyablement audibles jusqu’à plus de 8 à 10 000 Hz ! Impossible, dans ce cas, d’appliquer une compression trop forte, à moins de dénaturer le son ! En fait, cette harpe a un son aussi complet qu’un groupe musical entier : guitare basse, clavier, clavecin, etc.
J’espère que cet article a pu améliorer votre compréhension de ce délicat phénomène que sont la production d’harmoniques, le timbre et la tessiture. Encore une fois, n'hésitez pas à partager tout cela partout où vous pourrez : plus on est d'instruits plus on rit...
Cordialement,
Jean
Comments